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20 septembre 2011

Mardi 16 août. Les funérailles de ma belle-mère

 Mardi 16 août.

Les funérailles de ma belle-mère ont lieu le matin.

Le train de Miramas, où nous devons changer, a des soucis: nous ne pouvons attendre le prochain, nous serions en retard. Nous prenons un taxi. 100 euros. décidément, c'est plus de 1500 euros qui partiront ainsi dans ces allers-retours vers le Vaucluse cet été....

Sur place, nous apprenons que nous ne verrons pas les petits le jeudi comme convenu. la visite se fera aujourd'hui, jour des funérailles. Aucune horreur n'arrête personne, décidément....

J'affronte seule toute ma belle-famille. Mais je ne veux pas que les enfants soient là seuls, ni les priver de ces funérailles, alors....

Alors, je mets de côté mon ressentiment pour que chacun puisse passer tout de même un vrai moment parents/enfants.

Du coup, pas de visites avec les grands, qui partent dès les funérailles terminées.

Marc n'est pas entré dans cimetière. Tant mieux. Il y avait un ordi posé sur le cerceuil de mon beau-père, dans le caveau. Lorsque je suis arrivée et que j'ai entendu ces chansons françaises sortir du caveau...je ne suis pas facilement impressionable, mais cette impression que j'ai ressentie ne se décollera pas facilement....

Ma belle-soeur est venue avec ses deux "amis". Bon. L'un deux récupère l'ordi et le garde dans ses bras. C'est déjà ça. Il diffuse de la musique tout au long.

Heureusement, l'assistante sociale nous accompagne. Elle m'aide à récupérer Ulysse qui part "explorer" le caveau avec son aîné, mais il est effrayé...il y a de quoi...il y a déjà 3 cerceuils dont 2 très vieux dans ce caveau....les cousins de mon mari filment l'intérieur, des photos sont prises. Je n'en reviens pas, même si j'avais déjà eu un avant-goût pour mon beau-père. Finalement, l'assistante sociale intervient aussi auprès des grands. Je n'aurai pas pu assister à ces funérailles sans son soutien, son aide. Elle est parfaite. Discrète, mais présente. Je marche sur des oeufs, je crains de déclencher l'ire de ma belle-soeur et de faire un esclandre en pleine funéraille. Mes grands papotent avec elle, elle parle aux petits. Elle se permet de le faire alors qu'il souffrent tant par sa faute. Je puise tout ce que je peux comme ressources au fond de moi. Evidemment, "ils" n'attendent que ça, un esclandre dans le cimetière. Alors, je m'appuie sur l'AS, lui murmurre que cela devient trop, vraiment, et elle intervient encore.

Ca suffit.

Ouf....

J'insuffle à ma petite famille le plus de bonne énergie possible. Se changer les idées. l'expression prend tout son sens. Je crois que je n'aurai jamais consacré autant d'énergie, justement, à faire rire mes enfants. A consoler mon mari.

Nous restons en ville. L'Isle est si belle...

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Ulysse ne veut pas nous quitter, pourtant, nous allons encore passer un moment ensemble....mais rien ne le console.

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La semaine suivante, mardi 23 août, nous rejoignons notre bord de Sorgue.

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Nous ne sommes pas allés jusqu'au partage des eaux, il y a déjà tant de chemin à faire à pied. Mais ce petit coin de Sorgue nous est si familier. En toute saison, à mi-chemin entre la villa et le bassin, qui signe l'entrée en ville, nous nous arrêtions là pour profitez du moment, de la vue, de cette si grande paix, et nourrir les canards. Nous le faisons depuis que je suis enceinte de César. Cet endroit à donc tant de sens! 

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Vendredi 26 août.

Nous commençons, tout doucement, à sortir de notre torpeur pour préparer la venue des enfants.

Il faut terminer de trier les jouets dans leur chambre, ils sont pour la plupart toujours dans des bacs en plastique, ainsi que les vêtements qui sont toujours dans des sacs poubelles –nous avons eu 5 jours pour déménager lors de l’expulsion !- discrètement entassés dans l’un des deux dressings, ou dans les grands bacs en plastiques (ceux-là n’avaient même pas encore été vidé de notre déménagement Touraine/Vaucluse), et s’entassent dans un second placard où on ne glisserait plus une feuille.

La venue imminente des assistantes sociales déclenche cette seconde vague de tri et d’aménagements. La première, qui s’est terminée le 19 juillet, jour de l’anniversaire d’Héloïse, nous avait laissé sur les genoux et nous avions laissé les choses là où elles en étaient. Plus occupé à dépatouiller l’administratif.

Et à survivre.

Ce qui, dans ces conditions, requiert tant d’énergie.

Tout est prêt, le foyer qui va accueillir les grands a accepté de prendre les petits en charge pour le placement dans notre famille. Il ne manque qu’une signature, un accord. Celui du juge aux enfants de Marseille.

Toutes les énergies ont été mobilisées. Les éducateurs sont prêts, l’école a accepté l’inscription des enfants.

Un coup de fil va stopper net notre fébrilité. L’assistante sociale de l’ASE nous annonce que le juge marseillais refuse de se saisir du dossier. Oui, tout est prêt. Les énergies d’organisation ont déjà été dépensées. Il ne manque qu’une signature. Mais considérant que l’appel est proche, le juge préfère laisser le dossier fermé.

Les angoisses qui m’ont enserrées le jour où nous avons reçu le courrier nous annonçant le dessaisissement du juge avignonnais commencent à prendre un sens. Ce dessaisissement à pour conséquence de bloquer les enfants dans leur famille d’accueil.

Bien entendu, le juge aux enfants de Marseille pourrait se saisir du dossier.

Il en a le pouvoir, mais pas l’obligation.

C’est juste une possibilité.

Je m’effondre. Au téléphone, avec l’assistante sociale, du désespoir, des cris, des larmes.

Chaque coup qui nous est porté semble toujours plus insupportable et le dernier que l’on puisse accepter, assumer, vivre.

Les visages de mes deux plus jeunes enfants se brouillent dans mes larmes. Ils s’imaginent qu’ils vont rentrer à la maison dans quelques jours, et là, mais que vais-je pouvoir leur annoncer ? Que vais-je pouvoir leur dire ? Comment Ulysse va-t-il supporter cela ?

Nous étions le 26 août.

Pause d'émotions. Petit retour sur nos visites.

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Début avril, nous avions pris du retard pour la préparation du potager. Entre l'enquête sociale et la mort du papé; le jardin a été un bon moyen de laisser le corps exhulter et l'esprit de poser. C'est le jardin des petits...mais des grands aussi! Je leur ai promis de ne pas mettre les photos d'eux travaillant dans le jardin sur le net. Ces citadins avec les mains dans la terre, vraiment, quel sacrilège! Nous y avions mis tant de coeur, et tant de travail, il était la fierté des petits.

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Le décès de ma belle-mère rendant caduque l'expulsion, j'avais promis à Héloïse de retourner voir "son" potager au moins une fois. Mais en voyant au loin tout le terrain tondu, je l'ai prévenue: connaissant ma belle-mère et ma belle-soeur, le potager risquait d'avoir été saccagé. En effet. J'ai pris une photo d'Héloïse devant le figuier de son papa. Et nous lui avons ramené des figues. Il était très ému. Les garçons nous ont attendus au bord de l'eau.

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Hum...le potager n'est pas le seul à avoir été tondu...nous voulions rafraîchir la coupe d'Uysse. Comme il était réticent à se les laisser couper, nous avons essayé cette coiffeuse qui a un formidable siège pour faire patienter les enfants....et qui nous avait laissé si gentiment utiliser ses toilettes...mission réussie...Ulysse était enchanté. Moi, par contre, je n'ai pas digéré qu'elle les coupe aussi court, alors que je lui avais bien demandé de ne pas toucher au cheveux du dessus. Nous voyons déjà si peu les enfants, c'est difficile d'accepter une telle transformation, un tel changement. Cela m'apprendra, dorénavant, plus aucun coiffeur ne l'approchera! Na! D'ailleurs, César, qui tient à sa coiffure en bon ado qu'il est, ne laisse personne d'autre que sa mère, même quand il est au coeur de la tempête, lui toucher les cheveux!

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Une allégorie...le potager tondu? Regardez bien qui pousse malgré tout! Entre les pissenlits, on distingue trois sortes de salades. Choux et haricots feront peut-être aussi de la résistance? Ne repousserons-nous pas aussi après cette tempête? Je l'espère!

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Une leçon de biologie: Héloïse enseigne Ulysse. IEF.

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Dernière visite médiatisée avec les grands (que nous voyons...2 H/semaine) en compagnie des petits. Ils ne se verront plus. Ils en ont pourtant besoin, aussi.

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Le départ. On cache les émotions. Difficile de se décoller les uns des autres.

Dès lors il semble certain que leur rentrée scolaire se fera dans le Gard, dans le village de l’assistante familiale et, bien entendu, sans nous.

L’émotion est palpable des deux côté de la ligne, au téléphone. L’assistante sociale m’énumère toutes les démarches faites cet été, toutes les requêtes présentées au juge.

Là, tout à coup, je m’aperçois que si le juge d’Avignon a proposé l’éventualité d’un placement des deux plus jeunes enfants en famille, il a pourtant refusé que les visites libres puissent être aménagées progressivement vers des temps plus long comme cela se fait usuellement. Une journée, puis une journée et une nuit, puis un week-end. Et les derniers mots qui ponctuent le jugement me reviennent en mémoire.

« …sans une collaboration franche (…) les parents parviendront à un bras de fer entre la justice et eux ».

Nous avons osé interjeter appel.

Nous avons osé user de notre droit.

Comme nous avions osé user de notre droit à instruire nos enfants, comme nous avions osé user de notre droit à exercer notre foi.

Et cet exercice légal sonne comme le dernier des outrages à un magistrat.

Oser interjeter appel.

Nous paierons donc un prix de larmes et de sang pour cet outrage ultime.

Qu’importe le désespoir d’Ulysse, qui, invariablement, me demande si je peux appeler le juge pour lui demander de les laisser rentrer à la maison.

Qu'importe le temps qui passe et qui semble tellement plus long aux enfants qu'aux adultes. une éternité...

Ulysse qui a fait de l’asthme, qui souffre dans sa chair au regard de son âme. Qui a les yeux cernés en permanence. A qui il est parfois si difficile d’arracher un sourire.

De larmes, car le chagrin est infini, de sang car pour nous tous, la santé est au bord du précipice. Marc ne mange plus, ne dort presque plus, j’ai fait une thrombose, Ulysse a de l’asthme, puis des abcès maintenant, Héloïse des poussées d’allergie cutanées étranges…

Oh, bien sûr, l’ASE, l’assistante familiale, chantent un air de « Tout va très bien, madame la marquise ».

Nous rencontrons la pédiatre de la PMI de l’Isle, qui m’accuse d’exagérer les soucis de santé des enfants. Qui va jusqu’à prétendre que j’ai dit ceci ou cela, alors que c’est faux. Par exemple, lorsque César a eu des côtes froissées, j’aurai dit qu’elles avaient été cassées. Je proteste, choquée. Elle a appelé l’ophtalmo d’Héloïse, ses cataractes sont anecdotiques. Oui, aujourd'hui, mais « anecdotique » seulement depuis qu’elle a 6 ans, or elle m‘a demandé de reprendre les soucis de santé des enfants depuis la naissance ! Et il n’en reste pas moins que la lumière du soleil lui est néfaste (à cause d’un problème de réverbération).

Toute une liste suit ainsi.

Par contre, Héloïse a un second pancréas dans l’estomac, une gastrite, mais lorsque la pédiatre a eu le gastro-pédiatre au téléphone, il lui aurait répondu ne pas se souvenir de nos enfants (alors qu’il suit les 5 depuis 13 ans…)…. quel médecin, spécialiste de surcroît, qui travaille avec une secrétaire médicale, n’aurait pas dit quelque chose comme : « Rappelez un peu plus tard, je vais demander que l’on sorte leur dossier ? ».

Je me rends compte, de fait, qu’elle ne dit pas la vérité. Elle est médecin. Cela me trouble profondément. Ensuite elle exprime assez fermement son  mécontentement parce que Marc a énuméré les soucis de santé des enfants sur les bons d’inscription au centre aéré. N’est-ce pas normal ? Chaque mot écrit est vrai. « Mais ce n’est pas nécessaire de tout mettre » nous répond-elle. Sommes-nous médecins pour juger de ce qui est nécessaire ou pas ? Et alors que c’est Marc qui a signé, qui a rempli les bons, c’est tout de même moi qui suis en cause.

Je finis par sortir.

« Madame, vous êtes une personne dangereuse » lui dis-je en quittant la salle.

Et je frémis de m’apercevoir à quel point c’est abyssalement vrai.

Ulysse perd espoir. Parfois, il se niche contre nous, nous serre et puis parfois s’éloigne, s’arrête au milieu du chemin. « Je veux renter avec vous. Maintenant, tout de suite. C’est urgent ».

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Marc a encore perdu du poids. Les nouvelles de mon côté ne sont pas bonnes non plus, même si aujourd’hui, l’orage est passé. De petits caillots dans les poumons, finalement.

Je n’en reviens pas que l’on puisse mourir de chagrin, en France, au XXI ème siècle, pour des idées.

La poursuite du bonheur n’est pas inscrite dans la constitution française, mais la France n’est-elle pas le parangon des droits de l’Homme ?

Même le juge d’Avignon, qui justifie que « l’éloignement géographique (pendant 10 mois) et pédagogique du père ; la mainmise de la mère sur les sorties, les rencontres avec des tiers, l’instruction en famille ; le « poids » d’une religion aux principes sévères crée un climat de …terreur… » commence son jugement en reconnaissant qu’on ne peut trouver aucune trace, ni témoignages, de violences envers nos enfants ou d’autres personnes de la famille. Alors? Que font nos enfants loin de nous? Qui est maltraitant, ici? N'est-ce pas cette justice qui nous accable? Pouvons-nous espérer qu'à un moment donné, elle tranche pour la vérité, qu'elle accepte de stopper cette impitoyable engrenage qui n'a pas de sens?

Nous ne sommes pas dangereux pour nos enfants. Nous sommes bienveillants. Trop, sans doute. Puisque nos deux ados, lorsque leur grand-mère a menacé de mourir de chagrin s’ils ne venaient pas vivre avec elle, ne nous ont pas craint au point de mentir, de rendre de faux témoignages, même si, même ceux-là ne faisaient pas état de violences, mais d’une soi-disant trop grande pression de notre église. D’une soit-disant privation de liberté.

Le dimanche qui a précédé l’enlèvement des enfants, Ulysse et moi étions très enrhumés. Voyant que nous n’irions pas à l’église, César a haussé le ton. Ah, mais moi je veux y aller ! Il n’y avait pas de paroisse proche de la maison, dans le Vaucluse. 30 minutes de marche (20 de + avec les petits), 20 minutes de train, puis attendre qu’une famille de l’église accompagne de la gare à la paroisse. Ils auraient pu rester à la maison avec nous. Ils ont préféré y aller. C’est ça, le poids de l’église ?

A 14 ans, César a l’âge de participer au séminaire, une heure d’études des écritures hebdomadaires. Une trentaine de versets à apprendre sur une année scolaire. Une tâche si lourde…?

Lorsque nous étions en Indre et Loire, ils venaient tous les 2 seuls à Marseille, chez leur grand-mère, pour la voir et surtout, retrouver leurs amis. Ils se lèvent et se couchent quand ils veulent, ont un accès illimité à internet et aux activités de leur choix. Nous avons toujours accepté que des amis viennent à la maison, dorment à la maison. Un peu plus sélectionné, il est vrai, non pas chez qui ils vont, mais chez qui ils dorment. En respect de nos principes. C’est ça la privation de liberté ?

Nous avons toujours "mouillé le maillot" comme dirait mon mari, pour que se réalisent leurs ambitions, leurs désirs. En Touraine, je faisais 3H de trajet chaque jour pour accompagner Jeanne au conservatoire!

N’est-il pas normal que je demande à mes enfants, qui avaient entre 4 et 14 ans, de me dire où ils vont et avec qui ? Que veut ce juge ? Des enfants dont les parents ne savent ni où ils vont ni ce qu’ils font ? N’en a-t-il pas assez, d’enfants comme cela dans les délinquants dont ils s’occupent ?

Et que viennet faire les petits, dans cette histoire de famille triangulaire entre la grand-mère (et la tante), nos deux ados, et nous?

Ils ont pourtant, ces deux enfants si jeunes, clairement exprimé leurs besoins, leurs envies. Ils veulent tous les deux rentrer à la maison. Ulysse veut aller à l’école (il a changé d’avis depuis) et d’ailleurs, il y était inscrit depuis janvier, Héloïse y est opposée, ce qui a choqué le juge. Le fait qu’Ulysse manifeste le désir d’y aller ne témoigne-t-il pas de notre ouverture d’esprit à ce sujet….comme à d’autres ?

Mon aînée ne va plus à l’église, lorsqu’elle est en Belgique (elle y étudie, elle est entrée en sciences-politique hier). Elle a un petit ami. L’ais-je reniée ? l’Eglise l’a-t-elle excommuniée ?

Nos enfants ne sont-ils pas des êtres humains, qui ont le droit à l’affection de leurs parents ?

Les petits comme les grands ?

Une affection au quotidien. Pas diffusée au compte-goutte hebdomadaire.

Quelle responsabilité a-t-on donnée à cette écoute légitime des aînés, qui n’est pas passée par le filtre de la situation familiale dramatique que nous vivions à la mort du papé. Qui est devenue le bras séculier d’un haro sur les parents, responsabilisant au-delà de toute cohérence ces ados complètement dépassés par la suite donnée par les adultes. Et qui viendra peser cuisamment dans leur sentiment de culpabilité. Et la grand-mère des enfants en est morte, en effet. Loin de son fils et de ses petits-enfants.

Quelle folie. Quelles souffrances.

Après ce vendredi, une longue suite de combats s’est engagée, tous perdus par nous.

Voilà que l’assistante familiale ne veut plus venir à l’Isle sur la Sorgue. C’est trop loin, et le samedi, elle doit venir seule, elle va s’ennuyer, toute la journée, nous dit-elle, car son mari ne peut l’accompagner le samedi. S’ennuyer toute une journée… il y en a qui ont des boulos plus pénibles...pour 2000 euros par mois, ce n’est tout de même pas si pénible, non, une journée…dans un des plus beaux coins du Vaucluse….

Je reste tellement choquée. Les tensions s’accumulent.

Héloïse vient nous voir en nous expliquant qu’elle voulait devenir vétérinaire mais que son assistante familiale lui a expliqué que cela serait de trop longues études pour elle.

Evidemment, à 7 ans elle ne sait ni lire, ni écrire, ni compter comme les enfants de cet âge sont sensés le faire….comme 4/5 ème des enfants de son âge qui sont scolarisé sont sensés le faire. Car il ne faut pas oublier que de nouveaux chiffres sont tombés. 20% des enfants scolarisés sont laissés sur le carreau à la sortie des primaires.

Anaïs est avec nous, cet après-midi-là. Je crois peut-être encore plus choquée que je ne le suis moi-même.

Le soir, j’en parle avec H., l’assistante familiale. Elle a une personnalité très affirmée et une volonté d’acier. Tout va très bien, mais dès qu’elle est contrariée, l’échange se teinte d’agressivité.

Elle conforte son idée. Il faut beaucoup travailler à l’école pour pouvoir être vétérinaire. Anaïs intervient. Elle n’a pas beaucoup travaillé, et pas à l’école, elle n’a commencé à vraiment bosser qu’à 17,5 ans. Et aujourd’hui, après avoir –brillamment- réussi le jury (BAC belge) et sa prépa, elle entre à sciences-po. A 18,5 ans.

Il n’y a rien à dire, alors, H. reprend, mordante : « mais Héloïse ne sait même pas lire, ni écrire ». Il y a du mépris dans sa voix. j'en reste interloquée. Quelle estime de soi Héloïse pourra-t-elle construire auprès d'elle?

C’est vrai, elle n’en avait pas envie jusque peu de temps avant l’enlèvement, l’orthophoniste consultée nous a rassuré, pas de troubles d’apprentissages en vue.

Certaines pédagogies, dont Steiner par exemple, préconisent l’apprentissage de la lecture à partir de 7 ans. Moi, je suis assez décomplexée avec cela. Nos trois grands étaient des lecteurs précoces, qui ont tous appris en dehors de l’école.

Nous avions choisi de respecter les rythmes d’Héloïse; et c’est une décision respectable.

Je comprends bien que tous ces concepts soient nouveaux, inattendus, déstabilisants pour l’assistante familiale, mais tout de même, avec un peu de bon sens ne peut-on pas penser que des rêves de petite fille, cela se respecte, et que les principes de réalité nécessairement appliqués lorsqu’un enfant entre de force en scolarité n’interdisent pas de préserver ses aspirations, et même, de les utiliser comme levier pour l’encourager à cette mésaventure scolaire subie ?

Je sais qu'il y a aussi tant de bons moments dans cette famille, nous en avons vraiment conscience. Mais ce qui se passe mal pourrait être évité, et pèse si lourd!

Après des conversations houleuses avec la directrice du centre sociale de l’Isle (elle me raccrochera au nez) les jours passant, d’autres contraintes sont assénées. Les visites auront lieu le samedi, et à Pierrelatte ou à Orange, une semaine sur deux.

Nous avions vu les enfants le mercredi 7 septembre, lendemain de leur rentrée.

A l’Isle.

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Ulysse a perdu sa première dent. Sans nous, encore. Tant de moments volés. La semaine suivante, une autre est tombée...

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Anaïs est avec nous. Nous ignorions que ce serait notre dernier rdv à l'isle, et Anaïs croyait pouvoir les voir encore une autre fois...mais les dates ont été modifiées....

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Marc raconte les histoires de goupil qu'il inventait le soir. Ulysse les réclame.

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Petite séance de maquillage avec Héloïse. Nous tâchons de rester semblable à nous-mêmes, en tant que parents, en termes d'éducation. Mais bon, là, j'avoue, j'ai fait une entorse. Les filles semblaient si ravies de se maquiller!

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Ulysse vient me raconter "en cachette" les pitreries qu'il a prévues de faire "subir" à son papa. : )

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Le vendredi, nous apprenons que la visite du mardi suivant ne se fera pas, que ce sera le samedi, et pas avant la semaine suivante, donc, plus de 12 jours sans voir les enfants. Et Anaïs sera déjà partie.

Alors que ce mardi-là c’est justement l’anniversaire de Marc. Il a 35 ans.

12 jours. Une éternité.

Encore une fois, le cœur déchiré, il me semble que je ne peux plus rien supporter. De fait, je refuse d’en parler, le ton monte avec mon mari, qui veut juste en parler pour organiser ce voyage. Je ne peux pas, je ne peux plus en entendre parler.

Je suis assisse devant le bureau que j’ai aménagé dans le salon, en attendant que la pièce qui sert de bureau soit un peu dégagée des cartons de papiers.

Assise juste à côté de la fenêtre, de la porte-fenêtre. Elle est ouverte. Toujours, il y a ces volutes en fer forgé qui tournent, qui virevoltent et me donnent le vertige. Ne pas les regarder. Ne pas penser qu’il serait si confortable de se laisser glisser doucement, au long de ces branches du micocoulier qui balance ses feuilles doucement au gré d’un vent léger. SI confortable de ne plus souffrir sans cesse.

La tête entre les bras. Respirer. Ne plus penser. Ne plus rien ressentir. Juste mon souffle léger.

Penser à autre chose. Je relève la tête, je démarre un film sur l’ordi. Une comédie. Je m’enferme dans le séjour.

Nous n’aborderons cette question que la veille du départ.

Finalement, nous n’irons plus ensemble à l’Isle, alors.

Bien sûr, nous étions dehors, mais c’était un extérieur familier aux enfants. Ils étaient un peu chez eux dans la Venise Comtadine. Un peu de racines ensemble.

Là, on dépersonnalise encore plus, on dés-affecte encore plus ces rencontres. On piétine encore plus les racines, l’affect.

C’est une procédure de déshumanisation des relations, de nos rencontres.

Dès l’arrivée, à Pierrelatte, ce samedi, je ne peux plus parler à l’assistante familiale. A peine l’esquisse d’un bonjour. Mais je l’entends. Ulysse a eu un abcès, dans la gencive. C’était assez profond, plus important que ce qu’il semblait au départ. Il a fallu intervenir. Je me ferme à tout. Je serre Ulysse dans mes bras, je ne veux rien entendre de plus. Comment imaginer que nous n’avons pas été prévenus, que je n’ai pas pu au moins lui parler alors qu’il devait vivre ça ?

On me dira, il y a l’appel jeudi, tiens le coup. Mais jusqu’au bout, il y a tant de souffrance, tant de lie à boire pour vider le calice. 

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Notre première visite à Pierrelatte. Nous étions venu voir les petits ici, pour leur annoncer le décès de leur grand-mère. Si nous avions imaginé que cela donnerai à l'assistante familiale l'idée que tout compte fait, nous n'avions qu'à nous déplacer jusqu'ici...

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Nous avons commencé par une petite visite à la bibliothèque. Très lumineuse. Mais elle ferme à midi, le samedi.

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Marc nous entraîne au cimetière. Juste en face de la bibliothèque, habituellement, c'est moi qui traîne les pattes dans ces lieux paisibles, habituée à cela par mes grands-mères, et il rechigne à suivre. Puisque je ne peux le faire avec mes ancêtres, ici, en Provence, j'aime ces endroits paisibles où nous allons rencontrer ceux qui ne sont plus. J'aime aussi l'idée que les enfants ne soient pas exagérément effrayés par la mort. C'est toujours l'occasion de conversations profondes. Touchantes. Cette fois-ci, Ulysse et Héloïse ont joué les Robin des bois: ils ont récoltés quelques vieilles fleurs passées pour les redistribuer sur les tombes délaissées. Elles traînaient par terre, emportées par un coup de mistral sans doute,  alors j'ai laissé faire. Cela m'a touché, aussi. Ainsi que cette démarche de mon mari. C'est comme s'il donnait un sens à cet endroit où nous rencontrons les enfants, des ailes à défaut de racines. Marc ne veut pas être enterré dans le caveau de sa famille, il voudrait racheter une concession perpétuelle dans un village provençal. Du coup, notre présence ici prend un autre sens que la contrainte des ASE.

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Les journées du patrimoine ont coloré cette journée. Nous craignions qu'il n'y ait pas grand-chose à faire avec les enfants. Inauguration d'un moulin, Fifre et Tambourin. C'est une double culture qui coule dans les veines de mes enfants. Ça, ce sont les accents de leur papa. C'est de la peau de veau mort-né. Heureusement qu'ils n'ont pas bien entendu les explications. Merci à ce monsieur, Ulysse était ravi, concentré, mais ravi! "Prends-moi en photo pendant qu'on dirait que je suis le meunier et que je rentre dans mon moulin!!!!!!!!!!!!"

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Nous avons même trouvé une boulangerie au nom d'Ulysse!

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Un petit snack, sur la place, puis une glace, juste à côté. Journée RTT pour Gaby aussi: à défaut de rivière, Gaby a squatté à plusieurs reprises la fontaine. 

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J'adore cette photo, la tresse d'Héloïse et les oreilles de Gaby sont levé de la même façon, la bouche ouverte comme la gueule avec les petites dents qui dépassent, le mouvement de la main et de la queue sont identiques également, elle est un peu floue mais géniale, non?

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Et comme les pigeons viennent s'abreuver sur les étages suspendus...il y avait un double intérêt à ces baignades!

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L'office du tourisle, juste derrière. On passe de bonnes surprises en bonnes surprises. Super journée. trop courte. 6H.....

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Un paléonthologue en vrai, c'est Ulysse qui était ravi! Et cette maquette du village et du château de Pierrelatte! Héloïse a tout de suite repéré, à l'aide du stylo laser, l'ancienne prison où nous nous trouvons. Aussi forte que sa maman! : )

Ulysse est venu m'expliquer comment on pourrait créer un coffrage vitré qui pourrait monter et descendre pour que l'on puisse jouer avec la maquette de temps en temps. Bon, il veut devenir archéologue et plombier..un peu ingénieur aussi, non?

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Regardez bien, à droite, le petit escargot! Ulysse lui a fait visiter tout le musée! Rencontre des escargots fossiles et de l'escargot vivant!

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Une dame mérovingienne de 30 ans, qui est morte en mettant son enfant au monde à cause d'une malformation du col du fémur gauche (les restes de l’enfant étaient dans l'amphore). Le premier squelette d'Ulysse. Hum....une journée sur le thème des défunts...décidément...heureusement que l'ensemble était plutôt gai! Mais bon, quand on veut devenir archéologue.....Ulysse était fasciné, depuis le temps qu'il demande à voir un vrai squelette...et puis rien n'était triste! 

A droite, le rocher de Pierrelatte. Alors, c'est Gargantua qui s'étant arrêté à Pierrelatte a enlevé un caillou de sa chaussure, et voilà le rocher y est depuis. Le paléontologue à une autre version. N'importe quoi, ces scientifiques.

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Le musée de minéralogie et paléontologie de Pierrelatte, ouvert le samedi, à l'occasion des journées du patrimoine.

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J'aime le côté poudré crayeux de celle-ci, la petite touche de bleu sur la droite, la végétation elle même qui semble passée, vieillie; le visage sérieux d'Héloïse sur ces pierres usées, tant de fois centenaires. Elle est assise sur les marches d'une ancienne prison, elle en sort, tout un symbole, dans cette vieille France qui nous fait oublier un peu celle qui nous kidnappe nos enfants et nous torture.

 

 

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