Jugement
Il y a bien longtemps que je n'ai plus posté ici. Pourtant que de péripéties encore!
Vendredi, il y a deux semaines, nous avons reçu le jugement, provisoire toujours, du juge aux enfants.
Si nous nous attendions un peu aux résultats, nous avons été littéralement estomaqués par la virulence des propos.
Je joindrai ici dans quelques jours le compte rendu détaillé de cette incroyable diatribe de 2 pages.
Pour le corps principal, 3 choses nous sont reprochées.
1) l'éloignement du père, en 2010, pour des raisons professionnelles. Mais nous sommes réunis depuis fin novembre.....
2) la toute puissance des décisions maternelles. Les choix de non-sco, de loisirs, de sorties, de rencontres avec des tiers.
Euh...je rappelle que mes enfants ont entre 5 et 14 ans. Alors, oui, quand César part à son club de sport ou qu'il part à la maison des jeunes de l'Isle, il m'avertit....
3) là, le reproche est un peu plus nouveau, mais tout aussi virulent: nous donnons une instruction religieuse à nos enfants. Nous avons une vie religieuse quui "pèse lourdement" sur les ados. Et bien, concrètement, nous allons à l'église le dimanche, et nous prions ensemble, le soir, et aussi, nous bénissons les aliments. César va une fois/semaine à un séminaire d'écriture, depuis ses 14 ans.
Nos enfants, comme nous, ne boivent pas d'alccol, ne fument pas, pas de drogues...ni de sexe en dehors du mariage.
Lourd?
Cette conjonction de 3 facteurs justifie une situation de danger...le juge parle de climat de terreur...personne n'en revient de lire des choses pareilles dans un jugement...il est littéralement possédé par la haine, c'est terrible.
Enfin, si la situation des grands reste dans le flou artistique le plus absolu....le juge recommande tout de même que nous puissions récupérer les plus jeunes avec un SAPSAD (placement des enfants mais au domicile des parents).Mais cela n'aurait pu avoir lieu que si nous étions restés à l'Isle sur la Sorgue; or, nous en avons été expulsés par ma belle-mère....(hum, et surtout ma belle-soeur, qui, non contente de bébéficier déjà de l'occupation à titre gratuit d'un appartement T4 à Marseille dans le 8ème pour elle toute seule, voulait également pouvoir profiter de la maison que nous occupions dans le Vaucluse pendant ses WE....)
Il reconnaît qu'ils "peuvent souffrir" de la situation... et dans le réalité, Ulysse ne va pas bien. Asthme, problème d'estomac, nous sommes très inquiets. Héloïse aussi a démarré des soucis de santé.
Sur place, les enfants sont "bien dressés". L'assistante familiale m'a fièrement annoncé qu'ils avaient enfin renoncé au bol de lait du soir.
Ah, ça aussi, c'est mal? N'en est-ce pas assez que les enfants soient ainsi désorientés, il a fallu que leurs habitudes alimentaires, de sommeil, soient aussi profondément modifiées?
Pour installer un SAPSAD, il aurait fallu que nous soyons à l'Isle pour l'été, car il n'y en a pas sur Marseille.
Lundi 20 juin, nous voyons Ulysse et Héloïse, pour le contrôle d'inspection d'Héloïse. L'assistante sociale discute longtemps avec Marc.
Mardi 21, visite médiatisée, les assistantes sociales estiment que c'est MAINTENANT que nous devons récupérer les deux petits. Enfin, le temps que la procédure se fasse. Mise en place de ce système qui permet de maintenir le placement des enfants...chez leurs parents. Cela signifie qu'il y aura une batterie de personnes qui vont exercer leur pouvoir, juger, jauger.
Pour ma part, cela m'est égal, ils peuvent bien dormir à la maison, je n'en ai cure. Nous ne nous sentirions peut-être pas libres, c'est sûr. Mais cela n'a aucun poids au regard de la présence permanente des enfants à nos côtés. Ils ont coutume de voir du monde à la maison, cela ne les changera pas beaucoup! Et je ne vois pas comment ils pourraient eux-mêmes ressentir la coercition de la situation si nous nous sentons nous-mêmes détendus.
Nous n'arrivons pas à y croire. C'est un tel soulagement, après le choc de la lecture du jugement (notre avocate a déposé appel l'après-midi même) la pression retombe tout doucement. L'incertitude qui plane pour les grands me met mal à l'aise. L'assistante sociale qui est la référente des enfants semble partager notre point de vue, au sujet des visites qui se poursuivent entre les 2 grands et ma belle-famille. Mais j'ai l'impression que sa hiérarchie ne voit pas les choses du même oeil.
Les grands reçoivent de l'argent de ma belle-famille, sont orientés pour lancer tout azimuts des pistes épineuses: "Papa se gave de médicaments toute la journée" assure César (mon mari a fait une dépression en 2009 -un effet boomerang tardif des attentats de '95 conjugué à une pression extrême au travail- mais jusqu'aux évènements récents ne prenait plus quoi que ce soit comme médicaments, ce qui n'est pas mal pour un pays où on est les champions des anti-dépresseurs).
Et lors de la visite médiatisée, en apparté, il murmurre: "Mais si on retourne à la maison, maman va nous déscolariser au milieu de l'année".
Ma belle-famille espère ainsi par sa voix maintenir les soupçons ainsi les soupçons quand à ma soi-disant folie guerrière contre l'école. Ulysse est inscrit à l'école depuis le mois de Janvier. Bien avant que quoi que ce soit comme procédure ne démarre. Lorsqu'Anaïs, l'aînée, a voulu entrer en terminale, j'ai remué ciel et terre pour qu'elle puisse entrer au lycée (allez demander pour intégrer à l'école -fut-elle publique- un enfant qui a plus de 16 ans et n'est plus en obligation de scolarisation, et vous aurez une idée du combat à mener.....).
Ces soupçons sont infondés et ridicules. César m'a accompagné lorsque j'ai rencontré le proviseur du lycée, était présent lors de mes démarches auprès de l'académie. Et ce comportement en dit long sur le pouvoir de nuisance de ma belle-famille. Qui a réussi a effacer les actes posés au profit d'élucubrations enfoncées dans l'esprit à grands coups de boutoir. Un matraquage sans fin, avec des coups de fil quotidiens qui ordonne, conseille, sussure.... Mes grands sont pris au piège de cet allégeance qui mêle l'argent à l'affectif. Ma belle-mère, qui est veuve à présent, ne va-t-elle pas mourir si son César ne reste pas à ses côtés? Ma belle-soeur n'est-elle pas si malheureuse d'être divorcée, sans enfants, et ne serait-il pas justice qu'elle puisse compenser un peu en s'occupant désormais des grands? Et cet appartement que vous aurez pour vous seuls parce que je suis en permanence en déplacement? Et cet argent à profusion qui coulera dans vos escarcelles....
Et nous, nous avons deux heures/semaine, pour les 4 enfants, pour tenter de faire le poids, d'ouvrir les yeux sur ces agissements dignes des sectes les plus coercitives?
Nous préparons l'appel, mercredi, jeudi passe.
Nous avions un rendez-vous lundi pour l'appartement, mais l'argent pour l'agence, prêté par une amie, n'est pas arrivé. J'appelle ma banque le mardi, le mercredi. Jeudi, nous avons un nouveau rdv avec la banque, je passe au crédit agricole de l'Isle sur la Sorgue.
Enfin quelqu'un qui écoute, et agit. Le chèque a été déposé au guichet du crédit agricole d'Espéraza, dans les Pyrénnées, et a été perdu.... Marc attend sur un siège, il est effondré. Moi je me demande encore comment je peux tenir debout. Si je ne signe pas pour cet appartement , à Marseille, que je repousse encore le rdv, ne va-t-on pas se retrouver à la rue? Mais il n'y a vraiment rien à faire. J'annule le rendez-vous, cela ne se passe pas très bien. le contrat non-signé, l'annonce est toujours en ligne et l'agence est inondée de demandes. Il faut dire que l'appartement est vraiment une affaire en or....
Vendredi, Marc reçoit son salaire, je tente de contacter, dès potron-minet, le directeur de mon agence pour qu'il accepte le léger découvert autorisé supplémentaire pour que nous puissions avoir les chèques de banque qui nous permettrons de signer le contrat. Je finis par lui laisser un message lui décrivant l'urgence de notre situation.
Vendredi, 10 H. L'huissier arrive. Le verdict est tombé comme un couperet. Expulsion avant le 30 juin. Nous restons comme des boxeurs sonnés. Comment organiser un déménagement en si peu de temps? Comment ne pas déménager un samedi et bénéficier de l'aide que pourraient nous apporter les amis, les membres de l'Eglise?
A 12H, nous sommes à la gare. je suis déjà pasée au CMS, pour déposer une malette afin que César ait du matériel pour passer l'épreuve artistique de son brevet. J'avais averti l'assistante sociale de l'expulsion imminente.
Car plus de l'Isle, plus de SAPSAD. Que va-t-il se passer pour les enfants? Nous l'ignorons totalement.
Le directeur de la banque m'appelle, en chemin. il me donne son accord. Enfin! Je laisse des messages à l'agent immobilier mais je n'arrive pas à la contacter.
Comme convenu, midi trente, j'appelle le directeur de l'école privée. Nous aurions du être dans son établissement, avec les petits et les AS. Mais elles n'ont pas pu libérer du temps pour le faire. Je lui explique la situation. Le stress monte. La "libération" des enfants est aussi suspendue à sa décision. C'est un homme calme, pondéré, avec ce qu'il faut d'empathie pour que je me sente à l'aise, et d'efficacité pour que nous puissions débloquer la situation -le jugement "provisoire" est un chantage à la re-scolarisation- le plus rapidement possible. Il nous faut l'inscription des enfants. Son établissement privé nous rassure: nous sommes en ZEP et les enfants n'ont quasiment jamais été à l'école. Et il est très proche de la maison: 350 mètres.
Il va attendre que les AS prennent rdv avec lui.
Une personne qui nous soutient nous propose de nous faire un prêt du montant qui nous manque pour les caution/loyer/frais d'agence. Sa banque envoie la preuve de virement à notre banque.
Moi, je m'accroche à cela. Nous vivons tellement d'opposition, il y a des personnes si toxiques et si mal intentionnées dans notre entourage. Mais la situation difficile a surtout mis en exergue les merveilleuses personnes qui nous entourent. Parfois sans savoir qu'elles nous entouraient. Ou même sans les connaître.
Marc est tellement mal. Nous arrivons à Marseille. Moi, je suis dans l'urgence. J'occulte, je désolidarise. Mes sentiments sont étouffés pour ne pas atteindre notre efficacité. C'est comme si cela arrivait à quelqu'un d'autre. J'achète des sandwichs. Marc ne veut pas manger, sa gorge est nouée. Moi aussi. Je me fâche un peu. On s'assied. Ca suffit. On doit manger quelque chose, sinon, on va tomber, on a encore rien avalé de la journée. Nous arrivons à la banque. Les chèques de banque sont signés. Le mercredi, nous avions fait partir l'assurance pour ce nouvel appartement. L'agent immobilier m'appelle. Elle ne pourra pas nous recevoir, ce sera lundi, plutôt que le rdv convenu mercredi 29. Son ton de voix me rassure. Je commence à croire que l'appartement ne va pas nous passer sous le nez.
Léticia nous téléphonne. Elle est à Montpellier. Sur la route pour nous rejoindre. Elle nous récupère et nous partons à l'Isle sur la Sorgue. Samedi, l'emballage commence et je me pends au téléphonne et sur l'ordi. L'appartement est au 3 e étage, sans ascenceur. Nous trouvons un monte-charge pour lundi soir. Diane, notre amie qui range, trie, classe plus vite que son ombre, et qui dirige d'une main de maître les opérations, nous apporte son camion, samedi, puis, tout compte fait, dimanche. Nous trouvons 2 jeunes qui vont nous aider à remplir le camion, et 2 amis de Marc passeront l'apm pour embarquer le lourd: machine à laver, piano, etc.... Lundi matin, les missionaires passeront aussi à la maison pour "finir" le camion.
A midi, on décollera pour Marseille, nous nous arrêterons à Salon pour embarquer 2 sommiers neufs pour les filles.
Mais...en attendant...il a fallu retourner dans les chambres des enfants, que j'ai soigneusement évitées, alors qu'elles ont fait tant de bien à Marc.
Trier et emballer les vêtements. Je sors la petite veste verte d'Ulysse. Il l'a mise tout l'hiver. Et tandis que j'y enfouis mon visage, les sentiments tapis font surface.
Insupportable.
Il faut ré-enfouir. Vite. Juste pour pouvoir survivre, continuer.
Réanimer les sentiments positifs.
Quand je revois ma belle-mère, ma belle-soeur, une espèce de calme m'envahit. J'ai entendu leur voix. Et j'ai pensé plus jamais. Après ce qu'elles ont fait, je n'aurai plus jamais à les voir, à les entendre. Et c'est un soulagement si intense. Je n'aurai même pas à l'exiger. A être celle qui pose les conditions, qui embarque son époux dans un épouvantable conflit d'intérêt intérieur. Qui prive ses enfants de leur sang. Juste, plus jamais. En paix. Après 15 années de tourments. La paix.
Je pense à l'appartement, au millier de choses que j'avais envie de faire avec les enfants dans cette grande et belle cité phocéenne.
A la vie familiale qui va prendre un si doux chemin, avec Marc qui travaillera à moins de 5 minutes à pied, qui prendra avec nous le repas de midi.
Je me remplis une dernière fois de la vue fabuleuse, des monts de Vaucluse tout bleus qui moutonnent dans la brume du matin. Je me rempli les oreilles du coucou qui me rapelle celui tapi dans les lilas qui me réveillait doucement, petite fille. Aux trilles d'un passereau qui lui répond. Aux gazouillis légers qui monte des haies qui nous ceignent. Et au silence si grand, si ouaté qui nous apaise, le soir, lorsque nous fermons les yeux, épuisés, tendus, puis décontracté par ces premières si belles nuits d'été.
Dimanche matin. le téléphonne sonne. Françoise, que nous avons rencontrée samedi au super U et qui nous a proposé l'aide de ses fils, nous appelle. "J'ai pris des renseignements sur vous, je ne veux pas que mes fils viennent chez vous".
Mais qu'est-ce que ça veut dire? Marc tape notre nom sur internet. La pétition apparaît. Et c'est cela qui justifie une telle réaction? Nos voisins nous soutiennent, certains ont même écrit des témoignages pour nous. Alors?
Je n'arrive pas à lui répondre, écrasée par l'agression. Je raccroche sans rien dire. là, je suis effondrée. Nous sommes dimanche matin, le monte-charges est loué pour lundi soir, comment pourrions-nous remplir le camion à deux, tandis que Léticia, 50 kg tout mouillé emballe les derniers cartons?
C'est trop. Je m'enferme dans la chambre abasourdie. Je m'assieds sur le lit. Juste un peu de temps pour digérer l'agression, et enfouir, enfouir encore.
Puisque les choses les plus folles et les plus agressives semblent pouvoir nous arriver, il faut bien admettre que les choses les plus folles et les plus bienfaisantes nous portent également.
Non, pas tout à fait, elles sont plus fortes.
Je sors, je propose à Léticia de sortir. Allons au super U, chercher des cartons. Allons au marché. Je ne sais pas ce qui va se passer, mais nous allons revenir avec une solution. Au super U cela ne démarre pas très bien. Je n'arrive pas à trouver l'énergie de contacter les gens. Léticia en déborde. Trop, me semble-t-il. Elle est mon Aaron, je suis son Moïse. On sort, elle aborde un homme qui finit de vider son caddie dans le coffre de sa voiture. Je fais la moue, il n'a pas le profil d'un homme qui aurait besoin de 4 sous pour bosser.
Il lui répond avec une amabilité peu coutumière sous ses contrées. Je hausse un sourcil. Je suis encore dans une spèce de torpeur, mais je me suis approchée. Ses mots chantent de vieux souvenirs dans mes oreilles. Un sourire. "Excusez-moi, vous n'êtes pas français, n'est-ce pas?". "Euh...non, je suis belge". Je lui tend la main. "Enchantée de vous rencontrer". Il sourit également il a compris. "Ah, une compatriote, alors?". La conversation s'engage. Il va essayer de nous trouver quelqu'un. Nous allons au marché. Un de ses amis nous appelle. Ils seront là à deux une demie-heure plus tard.
Gratitude.
J'ai l'impression de vivre dans une bande dessinée, d'être l'objet d'un combat entre les forces du Bien et les forces du Mal.
Je vois que même mon amie trouve tout cela surréaliste.
On badine au marché. Tapenade, poichichade, hoummos, feuilles de vigne. Pour un pique-nique convivial.
Il le sera.
De l'aide. D'une efficacité redoutable. De la compassion. Oui, un fameux retournement de situation!
A l'heure du goûter, les amis d'enfance de Marc arrive pour nous aider. On va descendre le piano. C'est...colossal... Je suis vraiment heureuse qu'ils soient là, pour Marc. C'est tellement important de se sentir soutenu. Une foule de sentiments nous submerge. Difficile d'évacuer la honte que nous ressentons même si la raison nous ressaisit: il n'y a as à avoir honte. Mais elle est là tout de même. Notre voisine, la maman de ces 2 amis, prend de nos nouvelles , elle s'est tant occupée de Marc lorsqu'il était plus jeune. Plus maternelle avec lui que sa propre maman. Sa compassion, son empathie, sa colère aussi, nous font du bien. Parfois nous ne savons plus si nous avons fait quelque chose de mal, si ce qui nous arrive est de notre faute. Si il y a un péché républicain commis que nous devons expier.
C'est difficile de garder toujours la tête à l'endroit dans la tourmente qui nous submerge.
Lundi matin, les missionaires de notre église nous aide à finir ce premier camion. Nous arrivons à Marseille. le monte-charges est déjà là. Il ne restera que 2 heures, la police arrive, heureusement, tout a été monté. C'est le papa de Léticia qui conduit le camion. Nous retrouvons nos amis de l'église. les iens tissés pendant 10 ans passés dans la cité phocéenne revienne. Notre pasteur est là aussi. Le compagnon de visites de Marc. C'est vrai que c'est un retour dans notre ville, où nous avons construit tant de choses, vécus tant de choses, et c'est plutôt bon. Doux. Rassurant. Les gréements nous saluent à chaque passage. Ulysse va adorer.Nous rentrons à l'Isle.
Mardi. Visite médiatisée. j'ai bien compris que nous n'aurions pas les petits aussi rapidement que prévu. je craque, je grapille du temps, ou plutôt, je ne supporte plus que l'on m'en grapille. La famille d'acceuil arive en retard. L'éducatrice est seule. Nous sortons. Récupérer Jeanne à l'arrêt du car. César ne viendra pas: il passe son brevet. Direction l'opticien: il faut de nouvelles lunettes à Héloïse. Une glace. En bord de sorgue. Puis Jeanne m'interpelle: je me suis occupée de l'école des petits, pas de la sienne. Ce qui n'est pas tout à fait vrai. J'ai trouvé une école sur Marseille mais elle n'est finalement pas adéquate.
J'ignore totalement ce qui va se passer avec les grands, et j'ai les mains littéralement liée par les AS, le juge. le ton monte. Ras le bol des simagrées des grands et de leur litanie "on a pas le niveau scolaire". Qui ne voulait pas bosser, à la maison? Qui a planqué (in fine, jeté!!!) ses cahiers, et les petits carnets de conjugaison que j'avais fabriqués à grands renforts de temps, de patience et de minutie?
L'éducatrice intervient, la situation se tend de plus en plus. Alors je vais devoir continuer ainsi, à laisser les grands débiter des âzneries sans rien dire? Marc m'exhorte au calme.
Moi, je n'en peux plus. je veux qu'on me rende mes enfants, point barre.
Je ne reconnais aucune légitimité au juge, aux AS.
J'ai la sensation que mes deux grands sont des enfants soldats. Littéralement embriguadés par ma belle-famille, lobotomisés, et à qui la justice française a remis une arme dans les mains. Pour assassiner les parents. C'est la première chose que l'on demande, à ces enfants soldats. Assassiner les parents. Les Kmerhs rouges faisaient la même chose. Afin qu'ils s'imaginent, ces pauvres gamins qu'il n'y a aucun retour en arrière possible, et que le plus sûr moyen de rester en vie est de faire partie des ces bandes assassines.
Vous avez des problèmes d'apprentissage? Vous vous sentez mal dans votre peau parce que vous êtes en plein dans votre croissance adolescente? L'éducation nationale n'a pas voulu vous réintégrer en son sein parce que vous êtres des enfants qui avez des soucis d'apprentissages? Vous souffrez parce que vous êtes en deuil, et que cela fait beaucoup de deuils et de séparations depuis un an? Tu souffres Jeanne parce que ton coeur ne te permet pas de réaliser ta vocation, devenir danseuse étoile? Tu protestes César, parce que l'envie de mener ta vie à ta guise dans un appartement, sans adultes, et avec des ressources "magiques" à profusion te démange plus que tout (et en effet quel ado n'en rêverait pas!)? Et bien, regardez, les enfants, tout ça c'est à cause de vos parents. Prenez une mitraillette et tirez, tirez à bout portant.
Tous vos problèmes vont s'effacer.
L'école est merveilleuse, tout à coup, vous ne serez plus dyscalculique et dyspraxique.
Tout à coup, grâce à l'école le savoir va couler en vous sans effort.
Tout à coup, l'école vous permettra de vous sentir bien dans votre peau, d'avoir une estime de vous-mêmes comblée.
Tout à coup, l'école va effacer vos peines et vos chagrins. La multitude de jeunes commes vous qui va vous entourer sera bienveillante, structurante, amusante. le corps enseignant va se plier en 4 pour vous écouter; vous choyer; vous comprendre.
A l'école magique de la République.
Mardi soir. Emballer, emballer. Remplir le camion. Le deuxième. Les missionaires viennent nous aider, encore. Nous déposons Gaby chez la maman d'une des deux personnes qui nous ont aidées, dimanche. Elle habite Fontaine de Vaucluse. Un dog sitting bienvenu. Elle semble vraiment gentille, est ravie de s'occuper de Gaby. Cette solution pourrait devenir définitive. Je ne sais pas, je n'arrive pas à trancher tout à fait la question. Trop de séparations. depuis l'enlèvement des enfants, il ne nous quitte plus. Enfin cela fait vraiment beaucoup de déchirements. L'attachement est fort. Un appart de 88 m2 sans parc autorisé aux chiens à proximité directe est un autre souci non négligeable....Donc, une solution provisoire. Pour que cela soit moins lourd à porter.
Nous partons, en retard évidemment. Le papa de Léticia ne pourra pas prendre son piano à 17H, nous filons à Marseille. Le camion est vidé à dos de missionaires -encore!- sur trois étages. On nous vole la palette de déménagement à roulettes. Une catastrophe. C'est un outil particulier pour les salons auxquels se rend Diane, éditrice, et son mari. Il faudra rembourser. Une tuile de plus. Mais la chaleur, la force, la sympathie des missionaires de notre église nous remonte le moral en flèche. Nous finissons dans ce petit resto tunisien qui presque jouxte la maison. On discute, on fait connaissance. C'est bon.
L'appartement est plein à craquer. Vendredi nous remontons en Ardèche. Diane nous a prêté son camion mais elle devait à ce moment-là vider un de ses gardes-meubles. Nous nous attelons à la tâche. Déménager un orgue, et du parquet massif, une cuisine, 2 camions lourdement chargés.
Je suis sans net, sans tel, à Marseille, pour quelques jours encore, sauf là, maintenant, parce que je suis chez Diane. Mais beaucoup de boulot, et peu de temps pour internet. Déménagement fini.
Je me demande encore comment on a pu réaliser un tour de force pareil.
Ulysse a l'air d'aller un peu mieux.
On va tâcher de ranger le plus vite possible pour pouvoir recevoir des visites d'AS....l'appart est un peu moins terrible que je l'aurai cru. Cuisine crado, sdb pas nickel, papiers peints du bureau à refaire, ainsi que la petite chambre (4 m2...) d'Anaïs, mais le reste tout repeint, propre...ouf! Le quartier plutôt rigolo (enfin, Marc, ça ne le fait pas rire....)....à 100 m du vieux-port. A côté de la grande bibliothèque de l'Alcazar. Il y a un super resto tunisien avec un couscous d'enfer à 5 E; et ma pizzéria préférée depuis 15 ans se trouve du coup à 200 m....bon, je vais un peu l'éviter, la patronne m'a demandé des nouvelles des enfants....et le bureau de Marc déménage à 350M de la maison en octobre...reste plus qu'à récupérer les enfants et cela ne sera pas si mal que ça!!!!
Nous faisons ce que nous pouvons à notre rythme: nous sommes épuisés. je me rends comte que j'ai stoppé mon traitement homéopathique, qui fonctionnait très bien. j'ai de nouveau l'impression d'être en permanence sous tension. je suis épuisée mais je ne dors que quelques heures, 4 cette nuit. Dans un état de stress et de vigilence permanent. J'ai à nouveau l'impression d'être à Londres sous les bombardements....le corps envahi d'adrénaline.
Le coeur déchiré. L'esprit torturé.
Demain, nouvelle visite médiatisée. Nous avons pu avoir un peu mes petits au tel, hier.
Ulysse demande quand est-ce qu'il va nous revoir. Héloïse lui réponds systématiquement "demain".
Alors, il lui soupire: "Ah, tu m'as rassuré....".